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dimanche 22 janvier 2012

DU PASTEL -1-






Les cadeaux de Noël  peuvent être originaux et   élargir par là même les connaissances.
Il en a été ainsi pour celui que  mon "petit frère "Petu" qui, entre deux fresques, durant un stage sur l'art de préparer du foie gras en région toulousaine a fait un petit tour en pays de Lestoure et a ramené à sa grande soeur une belle série tout de bleu colorée dont deux livres très intéressants expliquant 

l'histoire du 
PASTEL.


Le pastel, plante tinctoriale, permettait d’obtenir une couleur bleue qui avait le mérite de ne pas « passer » au soleil.
Cette plante à racines pivotantes, ne craignant ni la sécheresse l’été, ni le froid l’hiver, se trouva très bien dans les sols profonds, riches et limoneux du Lauragais. 

« De par de-çà en tout le royaume, le pastel ne vient bien qu’en Lauragais".
(Olivier de Serres)



La récolte des feuilles commençait vers la Saint-Jean et se poursuivait ensuite tous les 25 jours pour les feuilles les plus mûres de juillet à octobre. 

Les conditions de culture

Pour se développer le pastel a besoin d'un sol riche et meuble plutôt calcaire et argileux.

La plante a trouvé des conditions très favorables en Laurageais et dans l'Albigeois qui peuvent bénéficier d'hivers assez doux et pluvieux suivis d'étés ensoleillés. 
Comme cette culture épuisait rapidement les sols on mettait les terres en jachère l'année suivante puis elles étaient cultivées avec des céréales avant d’être à nouveau ensemencées par le pastel.

Dans le meilleur des cas, et dans la période la plus favorable, soit entre 1515 et 1560 environ, le pastel couvrait à peine 15% des terres, d'où une certaine irrégularité dans la production.

Les semailles, le désherbage, la récolte,réclamaient une main-d’œuvre importante et spécialisée.



La production
 On produisait en moyenne 15 tonnes/hectare en Lauragais, pour atteindre près de 22 tonnes en Albigeois. Quelques plants étaient mis de côté pour préparer l'ensemencement de l'hiver suivant. Pour cela, ils n'étaient déracinés que lorsqu'ils atteignaient à peu près un mètre de haut, portant des paquets de graines vertes qui devenaient marron à maturité et pouvaient alors être réutilisées.

Les étapes de la fabrication

 Le stockage
 Il fallait absolument   éviter le dépérissement des feuilles
Dans un premier temps, les feuilles récoltées pour la teinture étaient entassées au bout des champs, puis étalées sur place pour qu'elles ne pourrissent pas.  Elles pouvaient, également, être transportées à la ferme.
Ensuite, elles étaient lavées, puis mises à sécher dans un hangar bien aéré ou étendues sur un pré : on les retournait alors régulièrement, encore une fois pour éviter le pourrissement. C'était aussi une protection contre les rongeurs et insectes divers. Ces opérations nécessitaient bien sûr un personnel nombreux.

Le broyage dans les moulins pasteliers

 Durant cette opération, les feuilles étaient réduites en bouillie: on en récoltait une pulpe que l’on destinait à la fabrication de la teinture. Les moulins à traction animale, animés par une énergie douce et régulière, permettaient d’obtenir une pulpe homogène. Les autres moulins, à vent ou à eau, étaient délaissés, au profit de moulins pasteliers.


 
Ces derniers appartenaient en général à des paysans plus aisés.  La meule était une pierre horizontale au centre de laquelle était fixé un axe vertical. Tout autour de cet axe, par l'intermédiaire d'un manche relié à l’animal, pivotait une roue verticale, généralement en pierre (quelquefois en bois)  








 

La fermentation
 
Première apparition des "coques" 

Après broyage, la pulpe était mise à sécher six à huit semaines. Pour empêcher tout risque de moisissure, elle était sous surveillance constante . 



Durant cette période, une première fermentation débutait, permettant ainsi un façonnage. Réalisé généralement par les femmes, celui-ci comprenait la réalisation d'une boule de dix à quinze centimètres de diamètre. C'était la "coque"  
« coquaignes » ou « cocagnes »qui est à l'origine de l'expression bien connue "Pays de Cocagne", c'est à dire le pays des coques, symbolisant la source de toutes les richesses.

La pulpe mise en tas, débarrassée de son eau  étaient ensuite séchées pendant 15 à 20 jours dans des hangars sur des claies, dans un lieu aéré.


La seconde fermentation
 Les coques, une fois sèches, étaient écrasées et mouillées pour déclencher une seconde fermentation. Celle-ci était la phase la plus délicate, nécessitant une surveillance de tous les instants pour maîtriser sa régularité. Pour accélérer la fermentation on pouvait rajouter du purin ou de l'urine humaine d'hommes que l'on avait fait boire la veille dans des brasseries... pour la ralentir on pouvait aussi verser de l'eau claire.

Cela donnait une mixture noirâtre qui devait être remuée régulièrement pour maintenir son homogénéité.
A terme, après pulvérisation de la pâte, on obtenait ainsi un produit, d'aspect granuleux, que l’on appelait "agranat". C’est avec ce produit qu’on allait pouvoir fabriquer la teinture.

Une coque pesait environ 500 grammes et donnait environ la moitié de son poids d'"agranat". Le produit final devait représenter à peu près 7 à 8% du poids initial des feuilles, lors de la cueillette.

L’agranat était conditionné en sacs et pouvait être transporté facilement.

Cette phase-là, pouvait durer 6 mois, c’est à dire le temps de se remettre au travail pour entamer la mise en culture d’une nouvelle récolte. 

La teinture

 La couleur particulière du bleu pastel est obtenue par oxydation du jus verdâtre obtenu à partir des granulés d’agranat. En la mélangeant à d'autres teintures, on pouvait réaliser d'autres colorations (verts, pourpres ) d'excellente qualité.

La fin du pastel et l'arrivée de l'indigo
 La découverte du Nouveau monde, la culture de l’indigo qui s’intensifie, les échanges de plus en plus nombreux par les voies maritimes vont faire connaître et apprécier cette plante. 

Elle a l’avantage de se présenter sous forme de poudre bleue 20 fois plus dense que le pastel et surtout plus facile à l’emploi. En outre, son prix est 6 fois moins élevé. Dès lors l’indigo va peu à peu s’implanter dans toute l’Europe.

Le pastel mourra au milieu du XVIIIème siècle.
  



Voici les livres



Celui-ci je réserve sa lecture
pour les vacances de février...





Il a pensé à la passionnée de jardinage
ces quelques graines

 !!!



 
Bonne soirée...

anniversaire de Manie ce soir, d'autres surprises...

9 commentaires:

  1. Merci pour ce passionnant article sur un bleu d'origine naturelle. J'espère que tu nous informeras de la croissance des pastels de ton jardin. Bonne semaine prochaine et très bon anniversaire à Manie!
    Anne

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  2. Accélérateur de fermentation de pastel...en voila un beau métier.

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  3. Un très beau billet, intéressant et la magie lorsque l'étoffe dévoile tous ces tons de bleus...
    Bonne semaine
    Danielle

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  4. Passionnant... mais alors, tu vas en planter ?? sûr que tu ne pourras pas en faire de la poudre magique, trop compliqué, mais la fleur est belle, un peu sauvage !!! quelle intéressante idée de cadeau

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  5. Sur les couleurs je lis les livres de Michel Pastoureau. Je note aussi tes titres parce que c'est un sujet qui me passionne.

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  6. Bien sûr que ton billet me parle, j'étais encore à Lectoure il y a dix jours ou douze! Si tu passes par là je te recommande la visite de l'atelier que j'ai faite il y a cinq ans déjà...
    Un sujet passionnant ! Beaucoup de volets autour de Lectoure sont peints de cette couleur, entre autre, malheureusement la boutique en ville a disparu et on peut la retrouver à Toulouse. On découvre tous les objets teints avec "le bleu de Lectoure" à l'atelier et en ligne : http://www.boutique.bleu-de-lectoure.com/catalog/index.php

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  7. En voilà un cadeau qui t'a fait plaisir. A nous aussi du coup !

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  8. Voilà un article très intéressant qui m'a appris beaucoup de choses. C'est tout simplement passionnant et j'imagine à l'avance ton plaisir de faire pousser et faire parvenir à maturité ces quelques graines.

    Il y a longtemps que je n'étais pas venue sur ton blog et j'ai découvert dans la colonne de gauche de bien jolies photos de famille. Félicitations à tes jeunes. Je leur souhaite beaucoup de jours heureux

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  9. et aussi le livre Bleu de Michel Pastoureau...incontournable !

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